LES DEUX VOIX
I
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Aux jours de mon enfance, il m’en souvient, l’été, Que la brise du soir frissonnant dans la mousse ; |
II
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Voilà de ses deux voix le dialogue étrange : PREMIÈRE VOIX Jeune enfant, lys plein de candeur, DEUXIÈME VOIX Enfant, dont la Muse divine
PREMIÈRE VOIX Entends-tu ces accents doux comme la prière DEUXIÈME VOIX Entends-tu cette immense et profonde harmonie ? PREMIÈRE VOIX Sur la pelouse en fleurs qui frissonne et soupire, DEUXIÈME VOIX Vois ce torrent fougueux redouté des campagnes, PREMIÈRE VOIX Mais un gouffre l’attend…
DEUXIÈME VOIX Magnifique est sa chûte ! PREMIÈRE VOIX Heureux, trois fois heureux l’homme au cœur ingénu DEUXIÈME VOIX Bienheureux mille fois le barde audacieux PREMIÈRE VOIX Toute couronne est lourde, et le bandeau royal DEUXIÈME VOIX Le mortel couronné s’égale à Dieu lui-même : PREMIÈRE VOIX Dans ton doux nid de mousse, où rit un jour vermeil, DEUXIÈME VOIX Jeune aiglon, prends ton vol à la voûte étoilée ; PREMIÈRE VOIX Mais la nue en ses flancs renferme la tempête…
DEUXIÈME VOIX La foudre est le coursier de l’aigle et du poète !…
III
Ainsi chantaient ces voix, et moi naïf encor Gabriel Monavon.
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