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bon qu’il y ait une erreur commune qui fixe l’esprit des hommes, comme, par exemple la lune, à qui on attribue le changement des saisons, le progrès des maladies, etc. ; car la maladie principale de l’homme est la curiosité inquiète des choses qu’il ne peut savoir ; et il ne lui est pas si mauvais d’être dans l’erreur, que dans cette curiosité inutile.

1 La manière d’écrire d’Epictète, de Montaigne et de Salomon de Tultie, est la plus d’usage, qui s’insi nue le mieux, qui demeure 2 [le] plus dans la mémoire, et qui se fait le plus citer, parce qu’elle est toute com posée de pensées nées sur les entretiens ordinaires de la vie ; comme, quand on parlera de la commune erreur qui est parmi le monde que la lune est cause de tout, on ne manquera jamais de dire que Salo mon de Tultie dit que, lorsqu’on ne sait pas la vérité d’une chose, il est bon qu’il y ait une erreur com mune, etc., qui est la pensée de l’autre côté 3.


1. Page 444 du manuscrit.

2. le n’est pas dans le manuscrit, probablement supprimé par le relieur.

3. Le manuscrit porte la correction : ci-dessus, faite sans doute en vue de l’édition posthume. Pascal avait dicté de l’autre côté, c’est-à-dire sur le recto de la page qui contient au verso le second paragraphe du fragment. La pensée est double. La première réflexion se rattache à ce que Pascal dit de la misère et de l’inquiétude de riiomnie. (Sect. II, fr. 127, sqq.) Elle rappelle les fameuses théories d’Epicure pour qui toute explication scientifique est bonne pourvu qu’elle écarte le mythe, avec la crainte religieuse qui en découle ; pour mieux chasser cette inquiétude, un épicurien ne s’interdira pas d’énumérer à propos d’un même fait une série de théories différentes entre elles et incompatibles, mais dont l’accumulation fortifie l’idée essentielle qu’une explication rationnelle est possible.

La seconde pensée est une remarque de Pascal sur son propre style ; au même rang qu’Epictète et Montaigne, les maîtres de Pascal dans

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