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dans un chaudron à faire les confitures. Madame Morin annonça que je portais une tache rouge sur le rein gauche due à une envie de cerises qu’avait eue ma mère dans le jardin de la tante Chausson, tandis qu’elle me portait. À quoi le vieux Fournier, qui tenait en grand mépris les préjugés populaires, répliqua qu’il était heureux que madame Nozière s’en fût tenue, pendant la gestation, à un désir si modique, car, si elle se fût laissée aller à souhaiter des plumes, des bijoux, un cachemire, une calèche à quatre chevaux, un hôtel, un château, un parc, je n’eusse point eu assez de peau dans toute ma chétive personne pour porter l’empreinte de ces vastes envies.

— Vous direz ce que vous voudrez, docteur, fit madame Caumont ; mais, la nuit de Noël, ma sœur Malvina étant dans une position intéressante fut prise d’une envie irrésistible de faire réveillon et sa fille…

— Naquit avec un boudin pendu au bout du nez, n’est-ce pas ? interrompit le docteur.

Et il recommanda à madame Morin de ne pas m’emmailloter trop serré.

Cependant, je criais si fort qu’on crut que j’allais étouffer.

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