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On a dix fois aimé depuis eux. — La jeunesse
A coulé, fastueuse et brûlante, — et le Temps
Amène, un soir d’hiver, par la main, la vieillesse,
Qui nous prend, elle ! par les flancs !

Mais ces flancs terrassés qu’on croyait sans blessure
En ont une depuis qu’ils respirent, hélas !
D’un trait mal appuyé légère égratignure,
Qui n’a jamais guéri, mais qui ne saignait pas !
Ce n’était rien, — le pli de ces premières roses
Qu’on s’écrase au printemps sur le cœur, quand il bout…
Ah ! dans ce cœur combien il a passé de choses !
Mais ce rien resté… c’était tout !

On n’en parlait jamais… Jamais, jamais personne
N’a su que sous un pli de nos cœurs se cachait,
Comme une cantharide au fond d’une anémone,
Un sentiment sans nom que rien n’en détachait !
Ce n’était pas l’amour exprimé qui s’achève
Dans des bras qu’on adore et qu’on hait tour à tour…
Ce n’était pas l’amour, ce n’en était qu’un rêve…
Mais c’était bien mieux que l’amour !

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