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Elle s’excusa de son absence, parla de mistress Hare, et de ses petits garçons : de beaux enfants, mais trop turbulents. Puis elle demanda à Maltravers s’il avait vu lord Vargrave, depuis que ce dernier se trouvait dans le comté !

Maltravers répondit froidement qu’il n’avait pas eu cet honneur ; que Vargrave lui avait fait visite en se rendant au presbytère quelques jours auparavant, mais qu’il n’était pas chez lui, et qu’il ne l’avait pas vu depuis plusieurs années.

« C’est un homme qui a des manières fort séduisantes, dit mistress Merton.

— Assurément ; fort séduisantes.

— Et c’est un homme d’un grand mérite…

— Oui, il a beaucoup de moyens.

— Il paraît fort aimable. »

Maltravers s’inclina, et regarda du côté d’Éveline ; mais le visage de la jeune fille n’était pas tourné vers lui.

Le tour qu’avait pris la conversation était pénible au visiteur, et il se leva pour partir.

« Peut-être nous ferez-vous le plaisir de vous trouver à dîner ici demain avec lord Vargrave, dit mistress Merton ; il doit venir passer avec nous quelques jours, autant que le lui permettront ses affaires. »

Maltravers se trouver avec Vargrave, l’heureux Vargrave ! le fiancé d’Éveline ! Maltravers être témoin des droits affectueux, des privilèges enchanteurs accordés à un autre ! et à un autre encore qu’il ne croyait pas digne d’Eveiine ! Les images qu’évoqua l’invitation de mistress Merton le firent frémir.

« Vous êtes trop bonne, ma chère mistress Merton, mais j’attends un hôte à Burleigh ; un ancien et bien cher ami, M. Cleveland.

M. Cleveland ! nous serons enchantés de le voir aussi. Nous l’avons connu il y a bien des années, pendant votre minorité, lorsqu’il venait visiter Burleigh deux ou trois fois l’an.

— Il a bien changé depuis lors, il est souvent malade. Je crains de ne pouvoir prendre d’engagement en son nom ; mais, aussitôt après son arrivée, il viendra vous faire visite, et vous adresser lui-même ses excuses. »

Maltravers prit alors congé à la hâte. Il ne se sentit pas assez maître de lui pour adresser à Éveline autre chose qu’un froid salut, elle lui jeta un regard plein de reproches. Ainsi donc son éloignement du presbytère était prémédité, résolu

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