réaction de la liberté individuelle se manifeste avec une énergie croissante par la contradiction ; les hérésies se produisent pendant toute la période de formation d’une orthodoxie. Quand celle-ci est parvenue à son développement complet ; on ne voit plus naître d’hérésies, parce que les sujets de discussion sont épuisés ; mais le principe de la liberté individuelle, étant indestructible, commence dès lors à se manifester d’une autre manière, c’est-à-dire par la science.
Celle-ci procède par périodes répondant à des périodes de décadence des orthodoxies. La science grecque a commencé vers l’époque de Solon par une raillerie contre l’anthropomorphisme, quand un savant vint dire aux Hellènes que si les chevaux se créaient des dieux, ils leur donneraient des figures de cheval ; or, l’anthropomorphisme était la forme spéciale de l’orthodoxie des Hellènes. Quand a été inaugurée la science occidentale, sinon à l’époque où fut achevée l’évolution de l’orthodoxie romaine ? Galilée ne naquit-il pas l’année qui suivit le concile de Trente ? Ces dates d’ailleurs ne sont que des points de repère dans un mouvement continu dont les moments sont indiscernables ; car d’un côté les derniers progrès d’une orthodoxie sont très-lents, comme ceux d’un animal ou d’une plante qui vont toucher à leur âge adulte ; de l’autre, la naissance de la science est insaisissable : ses premiers progrès sont très-lents ; elle n’arrive à précipiter sa marche qu’au temps où l’orthodoxie elle-même précipite sa décadence.
Or, de même qu’en se formant cette dernière a peu à peu coordonné autour de son principe tous les éléments sociaux, de même, à mesure que la science grandit, elle tend à reprendre tous ces éléments, à les pénétrer de son esprit, à leur communiquer son principe de liberté et sa mobilité. Ainsi peu à peu la société se transforme dans un sens opposé à l’orthodoxie, de sorte