s’il en était autrement, ces pénitents seraient repoussés comme des fous par leurs propres églises, tandis qu’elles les tolèrent, souvent les louent, quelquefois en font leurs saints. Voilà pour la pratique.
La doctrine, une fois devenue orthodoxe, suit une loi semblable ; en voici un exemple. Le feu avait été allumé par le frottement de deux morceaux de bois choisis exprès et habilement taillés, l’un en fossette, l’autre en pointe. L’homme qui les avait préparés le premier fut un grand artiste, qui transmit son invention à ses successeurs et qui fut appelé ainsi qu’eux, par excellence, le « charpentier » (twashtri). Quand on vint à réfléchir que l’opération accomplie par lui une première fois avait engendré le feu, il en fut justement nommé le « père ». Bientôt la théorie, s’emparant des faits, dégagea le principe igné qui vit dans le végétal, et constata qu’il a son origine dans le Soleil. Le feu de l’autel fut dès lors conçu comme ayant deux pères, l’un céleste ou divin, l’autre humain. Quand la théorie du feu fut devenue la théorie du Christ, c’est-à-dire de l’oint (akta, ou latin unctus), et qu’après avoir longtemps subsisté en Asie, elle se transmit à l’Europe par l’orient de la Méditerranée, l’antique charpentier prit des Sémites le nom de Iousouf ou Joseph, et se retrouva dans le père nourricier du fils de Marie. L’orthodoxie catholique ayant consacré ce personnage, qui n’est presque rien chez les chrétiens d’Orient, Joseph obtint chez elle des honneurs particuliers ; il devint comme un second médiateur, il eut des autels à lui et des communautés d’hommes et de femmes spécialement attachées à sa personne.
Il arrive donc un moment où les dogmes religieux, en passant à l’état d’orthodoxie, commencent à perdre la valeur théorique qu’ils ont eue d’abord. A mesure que le temps s’écoule et que se déroulent les consé-