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der eût pu donner essor à quelque supplément de prosopopée, ils furent tous deux réduits au silence, pour un moment au moins, par un cri d’alarme échappé à la femme de charge :

« Où est-elle ? » s’était écriée mistress Pentreath, debout au milieu du salon, et promenant de tous côtés un regard effaré.

La dame à la mise modeste avait tout à coup disparu.

Elle n’était ni dans la bibliothèque, ni dans la salle à manger, ni dans le corridor extérieur… Après l’avoir en vain cherchée dans ces trois endroits, la femme de charge revint à M. Munder, le visage décomposé par l’effroi, et demeura debout devant lui dans l’attitude du plus complet découragement, ne sachant absolument ni que dire ni que faire. À peine commença-t-elle à se ravoir un peu, que, se tournant vers l’oncle Joseph :

« Où est-elle ?… j’entends savoir ce qu’elle est devenue ! Méchant et rusé vieillard ! être sans vergogne !… où est cette femme ? s’écria mistress Pentreath, qui n’avait plus ni couleurs aux joues ni merci dans le regard.

— J’imagine, repartit l’oncle Joseph, qu’elle s’est mise à visiter la maison toute seule… Nous la retrouverons en continuant notre tournée. » Si simple qu’il fût, le vieillard était, en somme, assez avisé pour s’apercevoir qu’il venait justement de rendre à sa nièce le service dont elle avait besoin. Mettez à sa place l’homme le plus artificieux de ce bas monde, il n’eût rien pu imaginer de mieux pour appeler sur lui la surveillance de mistress Pentreath, et y soustraire Sarah, que le moyen employé par lui en toute innocence de cœur, et lorsqu’il était à mille lieues de l’objet en vue duquel sa nièce et lui étaient entrés dans le manoir. « À la bonne heure, se disait-il maintenant en lui-même ; tandis que ces deux êtres colériques me gourmandaient à propos de rien, Sarah s’est glissée vers la chambre où se trouve sa fameuse lettre… Très-bien !… je n’ai plus qu’à attendre son retour, et à me laisser gourmander aussi longtemps qu’on le voudra.

— Que faire, monsieur Munder ? que faire au monde ? demandait la femme de charge… Nous ne pouvons cependant pas perdre ces précieuses minutes à nous regarder le blanc des yeux !… Il faut retrouver cette femme !… Attendez !… elle a fait quelques questions à propos des escaliers… Au moment où nous arrivions sur le palier, elle a regardé du côté du second étage… Monsieur Munder, attendez ici et ne perdez pas de vue un seul instant cet étranger !… Attendez, pendant que je

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