Tout le jour, à travers landes, vallons et bois,
Plein de larmes, ainsi qu'un vieux cerf aux abois,
Poursuivi par la meute ardente et découplée
Des jours heureux chantant dans ton long désespoir,
La soif inextinguible au gosier, jusqu'au soir,
À travers la campagne ironique et peuplée
De visions d'amants qui rapprochent leurs fronts,
Tu passas, tu rougis tes fiévreux éperons !
— Vengeance ! Cri féroce et stupide espérance,
Qui dans l'affolement d'une horrible souffrance
Sors partout et toujours d'un cœur d'homme jaloux !
A quel rêve jamais as-tu rendu la vie ?
Et qui donc, ta rancune une fois assouvie,
Dans un sein ruisselant toujours par mille trous
N'enfonce point encor ses dix ongles avides,
Conseillère sanglante aux promesses perfides ?
Tout le jour, dans ses yeux au brouillard épaissi,
Dans sa cervelle en proie aux griffes sans merci,
Tu t'élanças du fond des soupirs et des râles ;
Tu rugis dans sa voix qui frappa sans repos
Au loin sur la nature en paix et sans échos,
Vengeance ! Toi qu'on montre aux murs des cathédrales,
Inutile transport des hommes furieux !
Divine volupté, qui mens, comme les dieux !
Ils dorment tous les deux, là-bas, au cimetière !
Pour la noble victime et pour sa soif entière