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beau jour de ta vie . car tu xas à Dieu ! » Tous se rendent à l’échafaud. « Meurs, frère, crie-t-on à Richard, meurs dans le sein de Dieu !» Et le frère Richard monte à l’écha- faud, on le met sous la guillotine et on lui coupe la tête, à ce bon frère que la sainteté a envahi. — Je trouve cela très- caractéristique. Les faits sont relatés dans une brochure française : une traduction russe en a été faite, on l’envoie partout gratis comme supplément de divers journaux. D’ailleurs, nous n’avons rien de mieux que cette his- toire-là. Nekrassov raconte en vers comment un moujik frappe de son fouet sur les yeux de son cheval, t sur ses doux yeux ». Nous avons tous vu cela, c’est très-russe. Le poëte décrit le petit cheval surchargé, empêtré dans la boue avec sa charrue qu’il n’en peut retirer. Le moujik , furieux, le frappe, sans comprendre ce qu’il fait, enivré de la souffrance qu’il inflige. «. Tu ne peux , tire pourtant! Meurs, mais tire! » La rosse se débat; il la fouette, il la fouette, la brute sans défense , il la fouette dans ses doux yeux où roulent des larmes. Enfin elle tire, elle tire, finit par dégager la charrue, et s’en va tremblante, n’osant plus souffler , ne marchant plus que grâce à la force acquise. Nekrassov nous a fait là une peinture terrible. Mais le cheval nous a été donné par Dieu pour exercer nos fouets. Les Tartares nous ont légué le knout à cette fin. Pourtant on peut fouetter aussi les hommes. Un monsieur distingua et une « dame » fouettent volontiers avec des verges leur petite fille de sept ans. Le petit père sourit : les verges ont des épines, cela se sent mieux. Il s’échauffe à chaque coup; c’est un plaisir pour lui. On fouette une minute durant, cinq minutes, dix minutes, de plus en plus volontiers.

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