— Mère, on devrait les visiter, pour voir si elles sont en bon état.
— Nous avons le temps, répondit Hubertine de sa voix placide. Nous ne les accrocherons pas avant midi.
Il s’agissait de trois panneaux admirables d’ancienne broderie, que les Hubert gardaient avec dévotion, comme une relique de famille, et qu’ils sortaient une fois l’an, le jour où passait la procession. Dès la veille, selon l’usage, le cérémoniaire, le bon abbé Cornille, était allé de porte en porte avertir les habitants de l’itinéraire que suivrait la statue de sainte Agnès, accompagnée de Monseigneur portant le Saint Sacrement. Il y avait plus de quatre siècles que cet itinéraire restait le même : le départ se faisait par la porte Sainte-Agnès, la rue des Orfèvres, la Grand-Rue, la rue Basse ; puis, après avoir traversé la ville nouvelle, on regagnait la rue Magloire et la place du Cloître, pour rentrer par la grande façade. Et les habitants, sur le parcours, rivalisaient de zèle, pavoisaient les fenêtres, tendaient les murs de leurs plus riches étoffes, semaient le petit pavé caillouteux de roses effeuillées.
Angélique ne se calma que lorsqu’on lui eut permis de tirer les trois morceaux brodés du tiroir où ils dormaient l’année entière.
— Ils n’ont rien, rien du tout, murmurait-elle, ravie.