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bre, surtout si vous étendez par-dessus tout cela un ciel gris de fer comme l’habit de Kant. La Prusse n’a pas dû produire beaucoup de coloristes, si le reste du pays ressemble à ce que nous avons vu.

Vers Emmerich pourtant, le sol s’améliore un peu : l’on aperçoit des prairies parsemées de quelques bestiaux, des villages, parmi des bouquets d’arbres, qui semblent propres et bien tenus ; le voisinage de la Hollande se fait sentir ; enfin se dresse un mât à flamme rayée de bleu, de blanc et de rouge comme notre drapeau tricolore, mais transversalement : nous sommes en Hollande. Un commissaire nous demande notre passe-port pour la forme, et nous le rend avec courtoisie en nous souhaitant « bon voyage » dans notre langue ; car, à la frontière hollandaise, on recommence à parler français, et nous ne sommes plus obligé de déployer nos talents de mime.

On nous transvase dans des wagons jaune-paille aux formes arrondies et ventrues, ayant une vague coupe de galiote, comme si l’on eût enlevé des canaux les bateaux-poste inutiles pour les poser sur les lignes de chemins de fer. Ces wagons étaient très-confortables du reste, malgré leur apparence de voitures d’eau, et doublés d’un velours d’Utrecht que le voisinage de la

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