< Page:Leroux - Sur mon chemin.djvu
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
113
ESCALE

le fûmes. On nous attendait depuis sept heures

du matin. Trente landaus furent attelés inutilement, que l’on détela à midi. Sept heures de retard avec ce vent et cette mer. La joie de débarquer et l’heureuse perspective de ne devoir plus, le soir, dîner dans des boîtes à jaquet, qu’ils appellent à bord des « violons » !

Notre bonheur fut court. Plutôt la Baltique tout de suite que cette désillusion. Où donc la plage désolée où notre imagination avait placé Elseneur ? Où donc cette grève perdue vers le nord du monde ? Où l’ombre de ce château que hanta l’ombre d’un roi ?

Elseneur, tu as des usines avec leurs cheminées, avec le bruit de leurs marteaux et de leur ferraille ; tu construis des navires, tes quais reçoivent les denrées, et tes habitants sont uniquement versés dans l’art des transactions, et ton château n’est qu’une caserne, avec des soldats !

Certes, le style n’en est point banal. Les tours semblent des minarets et n’en sont point ; les portiques s’encadrent de consoles renversées et n’appartiennent point à l’architecture jésuite ; des coins veulent avoir des airs de châteaux-forts et ne datent point du moyen âge. Car il fut construit, ce château de rêve, en 1690, cent ans après que Shakespeare eut l’idée d’y faire vivre son drame ! Alors ?

Alors j’allai contempler le Sund, et je montai sur des contrescarpes qui datent de Vauban, et je fus appréhendé au corps par une sentinelle

    Cet article est issu de Wikisource. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.