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elle donc à connaître tout Chryzippe ? si cela était, en effet, le progrès consisterait évidemment à connaître tous les traités de Chryzippe. Mais, aujourd’hui, tandis que nous reconnaissons que la vertu a certains effets, nous présentons d’une tout autre façon le progrès qui nous en rapproche. « Celui-ci, dit-on, peut déjà lire Chrysippe sans aide !

— Par tous les dieux, mon cher, combien tu as fait de progrès ! » Quels progrès donc a-t-il faits ? Pourquoi te jouer de lui ? Pourquoi lui enlever le sentiment de ses maux ? Ne lui apprendras-tu pas de préférence quel est le fait de la vertu, pour qu’il sache où chercher le progrès ? Malheureux, cherche le progrès dans ce qui est ton fait à toi. Qu’est-ce qui est donc ton fait ? Ton fait, c’est de désirer les choses ou de les fuir, de manière à ne pas les manquer ou à ne pas y tomber ; c’est de t’y porter ou de les repousser, de manière à ne pas pécher ; c’est d’affirmer ou de douter, de manière à ne pas te tromper. Le premier de ces trois points est le plus important et le plus nécessaire ; mais si c’est en tremblant et en gémissant que tu cherches à ne pas tomber dans certaines choses, comment donc es-tu en progrès ?

Montre-moi donc ici tes progrès. Si je disais à un Athlète, « Montre-moi tes épaules, » et qu’il me répondît : « Voici les plombs dont je me sers. » — « Va-t’en voir ailleurs avec ces plombs, lui dirais-je. Ce que je veux voir, c’est le parti que tu sais en tirer. » Toi de même, tu me dis : « Prends ce livre sur la volonté, et vois comme je l’ai lu. » — Esclave, ce n’est pas là ce que je cherche, mais ta façon de te porter vers les choses ou de les repousser, de les désirer

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