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sonne instruite à devenir ignorante, aucune personne de cœur et de conscience à devenir égoïste et basse, même si on leur persuadait que l’imbécile, l’ignorant, l’égoïste sont plus satisfaits de leurs lots qu’elles des leurs. Elles ne se résigneraient pas à abandonner ce qu’elles possèdent en plus de ces êtres pour la complète satisfaction de tous les désirs qu’elles ont en commun avec eux. Si jamais elles pensent à la possibilité d’un pareil échange, ce doit être seulement dans un cas de malheur extrême ; pour échapper à ce malheur elles consentiraient à échanger leur lot contre n’importe quel autre, fût-il peu désirable à leurs yeux. Un être doué de facultés élevées demande plus pour être heureux, souffre probablement plus profondément, et, sur certains points, est sûrement plus accessible à la souffrance qu’un être d’un type inférieur. Mais, malgré tout, cet être ne pourra jamais réellement désirer tomber dans une existence inférieure. Nous pouvons donner plus d’une explication à cette répugnance ; nous pouvons l’attribuer à l’orgueil, ce nom qui couvre indistinctement les sentiments les meilleurs et les plus mauvais de l’humanité ; l’attribuer à l’amour de la liberté, de l’indépendance personnelle, que les stoïques regardaient comme un des moyens les plus effectifs d’inculquer

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