094 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
mouvant dans l'unité brute et l'épaisseur du monde, où il se fera la nature si familière qu'il l'imitera pour y toucher, et finira dans la difficulté de concevoir un objet qu'elle ne contienne pas. » (1894)
« Cet Apollon me ravissait au plus haut degré de moi- même. Quoi de plus séduisant qu'un dieu qui repousse le mystère, qui ne fonde pas sa puissance sur le trouble de nos sens ; qui n'adresse pas ses prestiges au plus obscur, au plus tendre, au plus sinistre de nous-mêmes ; qui nous force de convenir et non de ployer ; et de qui le miracle est de s'éclairer ; la profondeur, une perspec- tive bien déduite? Est-il meilleure marque d'un pouvoir authentique et légitime que de ne pas s'exercer sous un voile ? — Jamais pour Dyonisos, ennemi plus délibéré, ni si pur, ni armé de tant de lumière, que ce héros moins occupé de plier et de rompre les monstres que d'en con- sidérer les ressorts ; dédaigneux de les percer de flèches tant il les pénétrait de ses questions ; leur supérieur, plus que leur vainqueur, il signifie n'être pas sur eux de triomphe plus achevé quede les comprendre, — presque au point de les reproduire ; et une fois saisi leur principe, il peut bien les abandonner, dérisoirement réduits à l'humble condition de cas très particuliers et de para- doxes explicables. » (1919)
Quand on lit successivement ces deux passages, ce qui frappe aussitôt c'est la similitude de la pensée, et la divergence de l'accent : l'expérience pourrait se répéter tout le long des deux introductions ; la pensée reste toujours très proche d'elle-même comme pour vérifier par l'exemple cette affirmation de Valéry : « Le groupe le plus général de nos transformations, qui comprend
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