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— Oh ! ça non, et je ne le saurai jamais. À quoi cela me servirait-il ? je ne dois jamais rien avoir !

— Vous pourriez, quand vous serez vieux, devenir l’économe du couvent, quand le père Fructueux sera mort.

— Dieu m’en préserve ! J’aime donner, je déteste refuser.

— Mon grand-oncle dit qu’à cause de votre grande noblesse, vous pourriez même devenir le supérieur du moutier.

— Eh bien, j’espère que je n’en serai jamais capable.

— Enfin pourquoi êtes-vous comme ça ? C’est une honte que de rester simple quand on peut devenir savant. Moi, si j’avais le moyen, je voudrais apprendre tout.

— _Tout ! _rien que ça ? Et pourquoi donc voudrais-tu être si savante ?

— Je ne peux pas vous dire, je ne sais pas, mais c’est mon idée ; quand je vois quelque chose d’écrit, ça m’enrage de n’y rien connaître.

— Veux-tu que je t’apprenne à lire ?

— Puisque vous ne savez pas ?

— Je sais un peu, j’apprendrai tout à fait en l’enseignant.

— Vous dites ça, mais vous n’y songerez plus demain. Vous avez la tête si folle !

— Ah ça, tu me grondes bien fort aujourd’hui, petite Nanon. Nous ne sommes donc plus amis ?

— Si fait ; mais pourtant je me demande souvent si on peut faire amitié avec un quelqu’un qui ne se soucie ni de lui ni des autres.

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