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encore plus, car tout ce que je craignais au

monde, c’est qu’elle ne me prît en méfiance et ne me priât de ne plus jamais lui adresser la parole. Je m’attachai à détourner ses soupçons, et autant j’avais désiré qu’elle sût mon amour, autant je m’appliquai à lui faire croire qu’elle s’était trompée ou que j’avais renoncé à ma chimère. Je poussai la dissimulation et la couardise jusqu’à faire un doigt de cour à mademoiselle Corinne, tremblant qu’elle ne prît au sérieux les compliments que je lui adressais. Elle ne s’en soucia guère, elle visait à des conquêtes plus solides. Léonce, éconduit sévèrement par Impéria, donna le change à son dépit en essayant de prendre Corinne au sérieux. Elle se moqua de lui, et, quant à moi, elle me dit, en bonne camarade, qu’elle regrettait ma situation précaire, et ne comptait pas faire un mariage d’amour.

Dieu sait que je ne lui avais parlé ni d’amour ni de mariage. Je m’étais contenté de lui parler de sa beauté, qui était assez problématique ; néanmoins, mon naïf stratagème réussit. Impéria, qui était au fond bien naïve elle-même, se laissa persuader que je ne songeais point à elle, et, dès lors, elle me

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