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qu’il n’avait pas éprouvé depuis longtemps ; c’était comme s’il venait seulement de découvrir quel homme excellent il était.

Le piano était bon et l’exécution parfaite. Nekhludov, qui connaissait et aimait cette symphonie, en jugea ainsi. En écoutant l’admirable andante, il ressentit un picotement dans le nez, provoqué par son attendrissement sur soi-même et toutes ses vertus.

Après avoir remercié la maîtresse de la maison pour ce plaisir, qu’il n’avait pas goûté depuis si longtemps, Nekhludov allait prendre congé et partir, quand la fille du général s’approcha de lui d’un air résolu et, toute rougissante, lui dit :

— Vous vous êtes informé de mes enfants ; voulez-vous les voir ?

— Elle s’imagine que c’est un bonheur pour tout le monde de voir ses enfants, dit la mère, en souriant de ce touchant manque de tact de sa fille. Cela n’intéresse pas du tout le prince.

— Au contraire, c’est très intéressant ! protesta Nekhludov, touché de ce débordement d’amour maternel. Je vous en prie, faites-les moi voir.

— Elle emmène le prince pour lui montrer ses marmots ! s’écria en riant le général, de la table de jeu où il était assis en compagnie de son gendre, du propriétaire de mines d’or et de l’aide de camp. Allons, payez votre tribut !

La jeune femme, visiblement émue du jugement

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