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pierre duchatelet

…Personne encore chez lui que la bonne qui, interrogée à nouveau ne put que répondre comme la veille : — Madame m’avait envoyée très loin en courses, puis autorisée à aller voir ma tante des Buttes-Chaumont, à condition de revenir au plus tard à neuf heures du soir ; il en était huit et demie quand je suis rentrée et plus de madame. Rien que cette lettre d’elle pour monsieur, sur la table de la salle à manger. Je dis d’elle parce que je connais l’écriture de madame par le livre de dépenses qu’elle veut bien me montrer tous les soirs pour vérifier les additions.

— C’est bien, dit Pierre que ce cruel verbiage, déjà entendu mot par mot, agaçait prodigieusement et blessait jusqu’au cœur par la vraisemblance même des faits énoncés, — c’est bien, vous êtes une brave et fidèle fille. Restez à mon service en attendant le retour de madame qui m’annonce un petit séjour près de sa mère souffrante… Faites-moi un bouillon au Liebig et ouvrez une boîte de conserves… une de celles où il y a écrit dessus « Australian beef ». Je reviens dans un quart d’heure.

Et il sortit pour s’apaiser à la neige qui tombait à frais, à blanc, à doux flocons.

Une immense affiche blanche, devant laquelle stationnait un groupe nombreux, s’étalait sur un des panneaux de la devanture d’un café situé au

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