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Jocaste.

Hélas !


Œdipe.

Prenez ce fer, instrument de ma rage ;
Qu’il vous serve aujourd’hui pour un plus juste usage ;
Plongez-le dans mon sein.


Jocaste.

Que faites-vous, seigneur ?
Arrêtez ; modérez cette aveugle douleur ;
Vivez.


Œdipe.

Quelle pitié pour moi vous intéresse ?
Je dois mourir.


Jocaste.

Vivez, c’est moi qui vous en presse ;
Écoutez ma prière.


Œdipe.

Ah ! Je n’écoute rien ;
J’ai tué votre époux.


Jocaste.

Mais vous êtes le mien.


Œdipe.

Je le suis par le crime.


Jocaste.

Il est involontaire.


Œdipe.

N’importe, il est commis.


Jocaste.

Ô comble de misère !


Œdipe.

Ô trop funeste hymen ! ô feux jadis si doux !


Jocaste.

Ils ne sont point éteints ; vous êtes mon époux.


Œdipe.

Non, je ne le suis plus ; et ma main ennemie
N’a que trop bien rompu le saint nœud qui nous lie.
Je remplis ces climats du malheur qui me suit.
Redoutez-moi, craignez le dieu qui me poursuit ;
Ma timide vertu ne sert qu’à me confondre,
Et de moi désormais je ne puis plus répondre.
Peut-être de ce dieu partageant le courroux,
L’horreur de mon destin s’étendrait jusqu’à vous :

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