< Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LE CHEVALIER.

Oui, dis-je, voilà qui est fait ; M. du Cap-Vert devient un homme terrestre, un vil habitant de la terre ferme, un citoyen qui s’enterre avec Mlle Fanchon.


M. DU CAP-VERT.

Non ferai, par mes sabords : je l’emmène dans huit jours en Amérique.


LE CHEVALIER.

Vous ! monsieur ?


M. DU CAP-VERT.

Assurément ; je veux une femme, il me faut une femme, je grille d’avoir une femme… Fanchon est-elle jolie ?


LE CHEVALIER.

Assez passable pour un officier de terre : mais, pour un marin délicat, oh ! je ne sais pas. Vous comptez donc réellement épouser cette jeune demoiselle ?


M. DU CAP-VERT.

Oui, très-réellement.


LE CHEVALIER.

À votre place, je n’en ferais rien.


M. DU CAP-VERT.

Vraiment, je crois bien que vous n’en ferez rien… Mais que me vient conter cet homme-ci ?


LE CHEVALIER.

Je me sens attaché tendrement à vous. Je dois vous parler vrai : elle n’a pas assez d’embonpoint pour un capitaine de vaisseau.


M. DU CAP-VERT.

J’aime les tailles déliées.


LE CHEVALIER.

Elle parle trop vite.


M. DU CAP-VERT.

Elle en parlera moins longtemps.


LE CHEVALIER.

Elle est folle, folle à lier, vous dis-je.


M. DU CAP-VERT.

Tant mieux ! elle me divertira.


LE CHEVALIER.

Oh bien ! puisqu’il ne vous faut rien cacher, elle a une inclinaison.


M. DU CAP-VERT.

C’est une preuve qu’elle a le cœur tendre, et qu’elle pourra m’aimer.

    Cet article est issu de Wikisource. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.