< Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Une seconde fois tenter la destinée ?


Jocaste.

Hélas !


Égine.

M’est-il permis de ne vous rien cacher ?


Jocaste.

Parle.


Égine.

Œdipe, madame, a paru vous toucher ;
Et votre cœur, du moins sans trop de résistance,
De vos états sauvés donna la récompense.


Jocaste.

Ah ! Grands dieux !


Égine.

Était-il plus heureux que Laïus,
Ou Philoctète absent ne vous touchait-il plus ?
Entre ces deux héros étiez-vous partagée ?


Jocaste.

Par un monstre cruel Thèbes alors ravagée
À son libérateur avait promis ma foi ;
Et le vainqueur du sphinx était digne de moi.


Égine.

Vous l’aimiez ?


Jocaste.

Je sentis pour lui quelque tendresse ;
Mais que ce sentiment fut loin de la faiblesse !
Ce n’était point Égine, un feu tumultueux,
De mes sens enchantés enfant impétueux ;
Je ne reconnus point cette brûlante flamme
Que le seul Philoctète a fait naître en mon âme,
Et qui, sur mon esprit répandant son poison,
De son charme fatal a séduit ma raison.
Je sentais pour Œdipe une amitié sévère :
Œdipe est vertueux, sa vertu m’était chère ;
Mon cœur avec plaisir le voyait élevé
Au trône des Thébains qu’il avait conservé.
Cependant sur ses pas aux autels entraînée,
Égine, je sentis dans mon âme étonnée
Des transports inconnus que je ne conçus pas ;
Avec horreur enfin je me vis dans ses bras.
Cet hymen fut conclu sous un affreux augure :
Égine, je voyais dans une nuit obscure,

    Cet article est issu de Wikisource. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.