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Pour monsieur votre aîné, c’est un fou sérieux :
Un précepteur maudit, maîtrisant sa jeunesse,
Chargea d’un joug pesant sa docile faiblesse,
De sombres visions tourmenta son esprit,
Et l’âge a conservé ce que l’enfance y mit.
Il s’est fait à lui-même un bien triste esclavage.
Malheur a tout esprit qui veut être trop sage ?
J’ai bonne opinion, je vous l’ai déjà dit,
D’un jeune écervelé, quand il a de l’esprit,
Mais un jeune pédant, fut-il très estimable,
Deviendra, s’il persiste, un être insupportable.
Je ris lorsque je vois que votre frère a fait
L’extravagant dessein d’être un homme parfait.


LE JEUNE GOURVILLE.

Un pédant chez Ninon est un plaisant prodige !


NINON.

Le parti qu’il a pris n’est pas ce qui m’afflige :
J’aime les gens de bien, mais je hais les cagots ;
Et je crains les fripons qui gouvernent les sots.


LE JEUNE GOURVILLE.

Voilà le marguillier.


Scène II

Ninon, Le Jeune Gourville ; Monsieur Garant,
en manteau noir, grand rabat, gants blancs, large perruque.

MONSIEUR GARANT.

Je me suis fait attendre.
Le temps, vous le savez, est difficile à prendre.
Mes emplois sont bien lourds…


NINON.

Je le sais.


MONSIEUR GARANT.

Bien pesants.


NINON.

C’est ajouter beaucoup.


MONSIEUR GARANT.

Sans mes soins vigilants,
Sans mon activité…

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