< Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le parlement son autorité donna de nouvelles forces au parti. Une dame moliniste rendit son amant heureux, à condition qu’il serait pour le père Girard, et elle lui fit faire abjuration

du jansénisme dans ses bras.

La division augmentait de jour en jour : tout était en combustion dans les familles ; chacun se déchirait par les médisances les plus atroces ; les juges étaient les moins épargnés. Il y avait des gens d’un mérite infini dans les deux partis ; la passion les aveuglait ; ils se prètaient aux choses du monde les plus criantes[1].

Les jansénistes furent les premiers à débiter des libelles diffamatoires. Les molinistes ne restèrent pas en arrière ; et, ce qu’il y a de surprenant, c’est que ces écrits étaient moins faits pour la défense du procès que pour porter des coups mortels à la réputation des plus honnêtes gens. M. le Bret, intendant et premier président, fut le moins ménagé : on

  1. Voilà bien l’esprit d’animosité provinciale ; un pareil procès à Paris n’eût fait que prêter à rire ; le Marais seulement et quelques maisons de l’Ile-st-Louis en auraient fait une chose sérieuse ; mais personne à la ville ou aux faubourgs n’eût voulu prendre parti pour ou contre la Cadière, que par propos de table et pour s’amuser de ce scandale jésuitique.
Cet article est issu de Wikisource. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.