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DE LA SAGESSE
mât de son vaisseau, en défendant à tous ses compagnons sous des peines très sévères, de le détacher, dans le cas même où il le leur ordonneroit. Quant à Orphée, jugeant cette précaution inutile, il se mit à chanter les louanges des dieux, en s’accompagnant de sa lyre, et d’un ton si élevé, que sa voix couvrant tout-à-fait celle des Sirènes, celle-ci ne produisit plus aucun effet.
Cette fable se rapporte visiblement aux mœurs ; et quoique le sens de cette allégorie soit facile à saisir, elle n’en est pas moins ingénieuse. Les voluptés ont pour cause principale l’abondance[1], l’affluence des biens, avec un sentiment de joie et d’expansion. Lorsque les hom-
- ↑ La volupté et la joie sont réciproquement effet et cause l’une de l’autre : quand on jouit, on se réjouit, et quand on se réjouit, on jouit. Mais la joie a pour triple cause la jouissance actuelle, l’espérance qui l’anticipe, et le souvenir qui la ressuscite ; car l’homme a très heureusement et très malheureusement pour lui la faculté de tripler ainsi tous ses plaisirs et toutes ses peines.
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