< Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tantôt faillent telles plaisances,
Et la coulpe si en demeure.

Quand je considère ces teste
Entassées en ces charniers,
Touz furent maistres des requeste
Au moins de la chambre aux deniers,
Ou tous furent porte-paniers[1].
Autant puis l’ung que l’autre dire,
Car d’evesque ou lanterniers[2],
Je n’y congnois rien à redire.

Et icelles qui s’inclinoient
Unes contre autres en leurs vies,
Desquelles les unes regnoient,
Des autres craintes et servies,
Là les voy toutes assouvies[3],
Ensemble en ung tas pesle-mesle ;
Seigneuries leur sont ravies,
Clerc ne maistre ne s’y appelle.

Or, ils sont mortz. Dieu ayt leurs âmes !
Quand est des corps, il sont pourriz,
Ayent esté seigneurs ou dames,
Souëf[4] et tendrement nourriz
De cresme, fromentée[5] ou riz.
Leurs os sont déclinez en pouldre
Auxquels ne chault, n’esbatz, ne riz.
Plaise au doulx Jésus les absouldre.


Avec la pensée de la mort, une pensée qui obsède et tourmente Villon, c’est de savoir ce que deviennent les filles de joie quand elles sont vieilles. La fille de joie l’occupe particulièrement : on voit qu’elle a été pour

  1. Panetiers.
  2. Gens de rien qui portent des fallots le soir.
  3. N’ayant plus de désir ni de volonté.
  4. Délicatement.
  5. Espèce de gruau.
Cet article est issu de Wikisource. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.