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qu’il y a peu de cristaux parfaitement transparents, surtout quand ils sont épais.

3° Une troisième partie parvient à l’intérieur C du miroir, et d’auprès de la surface elle retourne dans l’air, et quelques rayons en viennent à vos yeux.

4° Une quatrième partie passe dans l’air.

5° Une cinquième partie, qui est la plus considérable, revient d’au delà de la surface ultérieure D dans le cristal, y repasse, et vient se réfléchir à vos yeux. N’examinons ici que ces derniers rayons, qui, s’échappant de la surface ultérieure D, et ayant trouvé l’air, rejaillissent de dessus cet air vers l’œil en rentrant à travers le cristal. Certainement ils n’ont pas rencontré dans cet air des parties solides sur lesquelles ils aient rebondi : car, si au lieu d’air ils rencontrent de l’eau à cette surface B, peu reviennent alors ; ils entrent dans cette eau, ils la pénètrent en grand nombre. Or, l’eau est environ 800 à 900 fois[1] plus pesante, plus solide, moins rare que l’air. Cependant ces rayons ne rejaillissent point de dessus cette eau, et rejaillissent de dessus cet air dans ce verre : donc ce n’est point des parties solides des corps que la lumière est réfléchie.

Voici une observation plus singulière et plus décisive : Exposez dans une chambre obscure ce cristal A B (figure 3) aux rayons du soleil, de façon que les traits de lumière parvenus à sa superficie B fassent un angle de plus de 40 degrés avec la perpendicule P.

La plupart de ces rayons alors ne pénètrent plus dans l’air : ils rentrent tous dans ce cristal à l’instant même qu’ils en sortent ; ils reviennent, comme vous voyez, en faisant une courbure insensible.

Certainement ce n’est pas la surface solide de l’air qui les a repoussés dans ce verre ; plusieurs de ces rayons entraient dans l’air auparavant, quand ils tombaient moins obliquement ; pourquoi donc à une obliquité de 40 degrés 19 minutes la plus grande partie de ces rayons n’y passe-t-elle plus ? Trouvent-ils à ce degré plus de résistance, plus de matière dans cet air, qu’ils n’en trouvent dans ce cristal qu’ils avaient pénétré ? Trouvent-ils plus de parties solides dans l’air à 40 degrés et 1/3 qu’à 40 ? L’air est à peu près deux mille quatre cents fois plus rare, moins pesant, moins solide, que le cristal : donc ces rayons devaient passer dans l’air avec deux mille quatre cents fois plus de facilité qu’ils n’ont

  1. 772 fois seulement d’après M. Regnault. (D.)
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